La création de RFF: une fausse réponse à de vraies questions.

Depuis le lancement de la première ligne nouvelle en 1978, les gouvernements successifs poussent la SNCF à emprunter sur les marchés financiers pour construire de nouvelles infrastructure, et acheter le matériel TGV. La SNCF s'endette à la place de l'état, dont les représentants se dégagent de leurs responsabilités en critiquant "la mauvaise gestion " de l'entreprise publique !

En 1995, avec une dette de 200 milliards de francs, l'équation financière présentée par le gouvernement est simple. Pour résorber la dette, il faut diminuer les coûts, réduire le trafic, contracter le réseau. Pourtant, malgré la diminution massive des effectifs (6 à 10000 par an pendant 10 ans), la réduction de l'offre Fret (fermetures de triages et de dessertes terminales), une politique de prix "agressive" en voyageurs, l'endettement de la SNCF n'a cessé de croître.

Toutes les organisations syndicales (CFD)T, CGT, FO, CFTC, FMC, FGAAC) rejettent le projet de contrat de plan 96/2000 (Définissant les relations entre l'état et la SNCF) qui accentue la politique d'abandon du ferroviaire. En même temps, les cheminots refusent la remise en cause de leur régime de retraite (plan Juppé), et sont le détonateur du mouvement de novembre/décembre 95.

Après avoir abandonné le contrat de plan au plus fort de la crise, le ministre des Transports Bernard Pons et la Secrétaire d'état Anne-Marie Idrac jouent les prestidigitateurs au printemps 96.

Le tour de passe-passe.

Ils proposent de transférer la part de la dette liée aux investissements d'infrastructure à une autre entreprise, créée pour la circonstance. En contrepartie, ils "capitalisent" cette nouvelle entreprise (baptisée RFN, puis RFF) en lui donnant la propriété du réseau SNCF.

La CFDT parle de "tour de passe-passe" et dénonce l'hypocrisie de l'état qui invoque les critères de Maastricht pour refuser de prendre à son compte cette dette publique. Elle rappelle aussi que la loi instituant RFF va au delà de la directive 91/440. Cette directive européenne oblige à opérer une séparation comptable entre l'infrastructure et l'exploitation et à procéder également à l'apurement de la dette des compagnies ferroviaires. En créant deux entreprises différentes, le gouvernement français devance les exigences de Bruxelles permettant ainsi l'ouverture du réseau à d'autres exploitants.

En février 97, lors de la présentation du projet de loi, la CFDT appelle seule à une manifestation devant l'Assemblée Nationale et dépose symboliquement des rails et des traverses sur son parvis.

Jean-Claude Gayssot, aujourd'hui ministre des Transports et Jean Jacques Filleul, actuel président du Conseil Supérieur du Service Public Ferroviaire (CSSPF), prennent la parole devant le rassemblement CFDT pour dénoncer le projet de loi.

La droite vote pour. Le PS, le PC et le MDC votent contre. La majorité des syndicats et dirigeants de la SNCF se laissent séduire par le mirage du désendettement et approuvent la reforme.

Aujourd'hui, il ne reste plus grand monde à la SNCF pour défendre RFF. Les charges que constituent les péages, le contrôle tatillon du propriétaire des infrastructures avant le moindre investissement, l'insuffisance de la rémunération de la SNCF par RFF pour entretenir le réseau, sont devenus insupportables…

Quand à la dette, elle pèse toujours aussi lourd sur le système ferroviaire français !

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