Améliorer le dialogue social sans remettre en cause le droit de grève

Par EricTHOUZEAU

La Direction de la SNCF a rendu public un projet d'accord sur "l'amélioration du dialogue social et prévention des conflits à la SNCF" . Ce texte doit être d'abord discuté et amendé, en dehors de toute pression extérieure.

Pour la CFDT, il ne pourra s'appliquer que s'il obtient l'aval d'une large majorité de syndicats.

Au préalable, la CFDT n'entend pas cautionner la stratégie managériale de "proximité" à travers le dossier "dialogue social". C'est bien au niveau du Directeur d'établissement que doit se nouer la concertation avec les délégués du personnel, (ou au niveau des dirigeants d'unité lorsqu'ils sont, par délégation, Présidents de CHSCT). Ce n'est pas le cas des DPX auxquels la direction entend trop souvent faire jouer le rôle de "fusibles". La Direction propose par ailleurs une série de mesures déjà évoquées : programmes spécifiques d'amélioration du fonctionnement des instances représentatives du personnel, bilan annuel des relations sociales aux trois niveaux de l'entreprise (national, régional, établissement), maintien des directeurs d'établissement et d'unité au moins trois ans dans leurs postes...Elle propose même de "respecter les accords conclus et les valoriser". Cela ne manque pas de sel, au moment où la Direction est prise en flagrant délit de non-respect de sa signature de l'accord Formation !

Concernant "la prévention des conflits", la Direction fait sa proposition phare: la démarche de "concertation immédiate". Cette procédure, non obligatoire, contraint la direction à ouvrir une concertation dans les trois jours, dès qu'elle est saisie par les organisations syndicales d'un différent susceptible de générer un conflit. Un relevé de conclusions contenant les points d'accord et de désaccord, est rédigé et diffusé au personnel. La CFDT est en partie à l'origine de cette proposition. Cela peut éviter les préavis que les équipes syndicales sont parfois obligées de déposer juste pour être entendues. Mais la Direction y ajoute un délai de 10 jours avant qu'un préavis de grève sur le même motif puisse être déposé. Trois jours de concertation immédiate plus un préavis de 5 jours sont suffisants pour négocier sans qu'il faille y rajouter encore dix jours. Gageons que la Direction reverra sa copie.

La Direction veut également " améliorer la prévisibilité du service en cas de grève". A chaque grève pouvant avoir une incidence sur les circulations, un plan de transport dit d'urgence est mis en place (U1, 2 ou 3 suivant l'ampleur prévisible de la grève). Elle propose de porter à la connaissance des organisations syndicales ce plan de transport. Les syndicats doivent-ils cogérer l'entreprise les jours de grève ? Chiche, on fait circuler les TER plutôt que les TGV ! Et pourquoi se limiter aux jours de grève et ne pas user d'un droit de veto sur la gestion par activité ? On n'en est pas là ! En attendant, le plan de transport doit rester du domaine de la Direction.

Enfin, la Direction propose " d'utiliser au mieux les capacités et les compétences dont l'entreprise dispose les jours de grève". La CFDT ne cautionnera jamais l'utilisation des non-grévistes pour briser l'action revendicative des salariés.

A côté de quelques idées empruntées à la CFDT (relevés de conclusions, retours d'expérience sur les conflits), d'autres propositions importantes sont absentes telles que la décentralisation budgétaire pour favoriser le dénouement des conflits locaux ou la revalorisation du rôle des observatoires sociaux en région et au niveau national.

Il faut trouver les moyens d'améliorer le dialogue social à la SNCF, sans toucher au droit de grève. D'autant que l'annonce des suppressions d'effectifs, le refus de négocier les salaires 2002, le budget 2003 qui s'annonce difficile, les menaces qui s'accumulent sur les retraites, nécessitent de conserver intacts nos moyens constitutionnels de pression sur la Direction et le Gouvernement.

 

Grève interdite ?

Le projet de loi de 130 députés UMP aussi "progressistes" qu'Alain Madelin et Christine Boutin, vise à interdire aux personnels des entreprises de transport de faire grève ...avant 10h et après 17 h ! Cette provocation, n'est pas de nature à rendre serein le débat sur l'amélioration du dialogue social à la SNCF. C'est ce que le ministre des Transports de Robien semble avoir compris en déclarant lors de la convention du Projet Industriel qu'il faisait "confiance au débat engagé au sein de l'entreprise". La CFDT appelle néanmoins à la plus grande vigilance sur l'évolution des positions du Parlement et du Gouvernement sur ce point.